la semaine de Saône et Loire (mars 2002)
Morvan
Saint-Martin troque la mer pour la pierre
Un gigantesque projet de village de vacances est en train de voir le jour dans le Morvan, autour du lac de Chamboux, à Saint-Martin-de-la-Mer. Les élus locaux y sont très favorables, mais les riverains y voient une menace à lenvironnement et à leur tranquillité.
La petite commune de Saint Martin-de-la-Mer, dans le Morvan, est fière. Son maire a pratiquement conclu un "marché" avec le célèbre "vacancier" Pierre et Vacances, qui prévoit la construction de 300 logements autour du lac de Chamboux. Avant daller plus loin, il faut dresser un peu le cadre :
Chamboux est un réservoir deau installé dans un site complètement sauvage, avec quelques petites collines autour. Cest le rendez-vous des oiseaux, des randonneurs, des pêcheurs et autres mammifères sauvages ou non. A proximité immédiate, deux hameaux de Saint-Martin: lsland, une trentaine dhabitants et Lavault, une petite vingtaine. Avec le camp de vacances, on peut raisonnablement penser quun gros millier de personnes supplémentaires va venir grossir cette population indigène.
Léconomie dabord
Il est bien évident que, tourisme vert aidant, les promoteurs lorgnent sur le coin depuis un moment. Un premier projet de Center Park a déjà échoué. Mais là, ça semble bien avancé avec Pierre et Vacances. Le syndicat du Barrage, qui regroupe les communes avoisinantes et les syndicats daménagement, a acheté le foncier sur 25 hectares autour du lac et il va revendre lensemble, viabilisé, au promoteur. Sans grande concertation avec la population, les élus locaux, le maire et le conseiller général du canton en tête, ont une connaissance parfaite du dossier. Et bien quils se défendent den savoir beaucoup plus que les trois ou quatre photos quils veulent bien montrer, ils ont une réponse à toutes les questions concernant laménagement futur.
Cest donc une association de défense, créée pour loccasion, qui est obligée de provoquer des réunions dexplications. Même si les élus en question ne refusent pas ces rencontres, étant donné lampleur de lopération, on ne peut que sétonner quils nen soient pas eux-mêmes les initiateurs. Il est bien évident que les habitants qui se posent légitimement des questions se demandent inévitablement quelles raisons peuvent bien conduire des élus à "avancer masqués".
Et les arguments de Pierre Poillot, le conseiller général PS, qui nest "pas daccord pour dire que notre pays na pas davenir, comme on la dit jusquà présent", et qui estime que "aujourdhui, nous sommes face à un projet de qualité", ont du mal à sonner juste. Même chose quand il affirme que "soixante-dix emplois vont être créés, ce qui est énorme pour un village comme Saint-M artin". Les opposants ont du mal à croire quil y en aura autant, "ou alors ce seront des emplois desclaves", comme lexplique crûment une riveraine.
A ceux qui demandent pourquoi Pierre et Vacances a un projet aussi gigantesque, les mêmes élus répondent en choeur: "léquilibre économique passe par le fait quil y ait 300 logements minimum". Sans plus dargumentation, sauf que "cest Pierre et Vacances qui le dit". Au-delà de cet aspect strictement économique, et qui bien sûr peut présenter des aspects intéressants à court terme pour le Morvan (en réalité, pour qui précisément?), les élus ne pourront pas éluder le côté écologique. Et il est bien clair que lassociation de défense va se battre dans ce sens.
Alain ROELS